la boîte à mots, le jeu : juin 2017 – textes

juil 2017 -
Si les mots avaient des ailes
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Les mots proposés pour notre jeu de juin 2017:  SECRET – TERRE – AVEU
voir les règles du jeu ici
Voici les textes que nous avons reçus


 

CHUT  (Caroline)

Je vais vous faire un aveu.
Je possède un secret.
Un gros secret !
Il est tendre et lumineux
Il me remplie de joie
Il me pousse en avant
Il me coupe le souffle
Parfois mes pieds ne touchent  plus terre
J’ai le coeur qui s’ebouriffe et les paupières humides , des papillons dansent dans mon ventre ……
Le soleil ne brille que pour moi !
OUF !!
Il me brûle les lèvres… mais je ne peux rien vous dire car… c’est un secret…


Magma originel (Gg)

Dans le magma originel, bien au-delà de la caverne de Platon, un ours polaire, égaré par mystère dans ce milieu inhospitalier, se gratte le dos à l’aide d’une branche de marronnier. Branche qu’il a arrachée à la Venus de Milo qui venait à passer. Exploit certes, mais à relativiser, lorsque l’on sait que cette beauté du monde céleste a perdu ses bras dans des conditions invraisemblables que je vais vous conter derechef.

Hors donc, Venus, ‘La Venus’ ou plutôt sa représentation milonaise, se promenait nue sous le ciel sans nuages des environs d’Athènes. Elle chantait, heureuse d’être libre et adulée des Dieux. Elle ne se rendait pas compte, la pauvrette, du péril qu’elle encourait, car son chant irréel se propageant dans l’Olympe et bien au-delà, hypnotisait les foules de mâles en mal de rut. Et chacun de se dire, ce qui n’était plus un secret pour personne, que la plus belle fille du monde passé, présent et à venir, se trouvait justement à portée de… oui, à portée de… , là-dessous, tout en bas sur la terre. Il suffisait d’être le premier pour s’emparer de la belle et l’emmener très loin, là ou personne d’autre ne pourrait venir la chercher. Le malheur, c’est que ce ne fût pas un satyre qui se rua sur la beauté mais une bonne centaine. Là je dois faire un aveu: je n’étais pas présent et je suis donc obligé d’imaginer la scène, ce qui n’est pas trop difficile sachant ce que le temps nous a légué de la demoiselle. De fait les six premiers satyres arrivés s’attaquèrent de concert au corps splendide, quatre aux membres, un à la tête et le dernier… ce fut lui qui eût le plus de chance: il en mourût. Quant à la belle… mais tout le monde sait ce qu’elle est devenue.


RENCONTRE DANS LE POTAGER (Martine)

Lillipop mûrit langoureusement, là, dans sa belle terre brune, au milieu du potager près de ses amies les courgettes.
Stupeur ! Un matin, elle se réveille blessée. Son piquet a été arraché et elle traîne comme une malpropre sur une petite butte de terre où se promène un ver de terre. Qui a osé fouiller son lit durant la nuit ?
Ulcérée, elle lève son pédoncule et aperçoit un drôle d’animal à la peau de velours qui l’observe.
–    C’est toi qui m’as abîmé pendant mon sommeil ? Qui es-tu ?
–    Je m’appelle Taupinette. Désolée pour le désagrément ! En fouillant la terre la nuit dernière, je n’ai pas fais attention où je mettais mes pattes.
–    Tu travailles sous terre ? demande Lillipop étonnée.
–    Oui c’est mon secret, réplique Taupinette et je vais te faire un aveu. Je creuse clandestinement des galeries partout dans les jardins et les potagers afin de trouver des trésors et lorsque ma mission est terminée, je retourne me reposer dans mon abri en attendant la nuit suivante.
–    Ton travail est formidable Taupinette ! s’écrie Lillipop en étirant sa peau veloutée. Puis elle ajoute : Tu me réveilleras la nuit prochaine pour que je vienne avec toi…
Mais Taupinette s’est déjà enfuie. Elle a aperçut à la sortie de l’un de ses souterrains, là, près des courgettes, le râteau du jardinier qui l’attend patiemment…


Joseph (Susan)

Joseph vivait seul à la ferme. Il avait l’habitude de  dire qu’il aimait sa terre mieux qu’il n’aimait les hommes. En tout cas, sa terre était mieux cultivée que n’étaient ses relations avec  le voisinage. C’était un homme secret et bourru. On le disait simplet. Mais au pays on est habitué à des gens rustres. On accepte les gens comme ils sont. Joseph avait sa place. Il était un des nôtres. Il est parti à  la guerre, laissant derrière lui une fiancée… Mélie Barnier. Quand il est revenu elle ne voulait plus de lui. Il y a eu une dispute, et après la Mélie a disparu. La rumeur courrait qu’elle était partie avec un italien venu faire les vendanges. Elle n’a jamais donné signe de vie, même à ses parents, des pauvres gens qui n’étaient peut-être pas fâchés d’avoir une bouche de moins à nourrir.
En 1920 la grippe espagnole a sévit au village. Beaucoup de gens ont été touchés. Certains mourraient mais pas tous. C’était une période très dure. Joseph tomba malade. Un soir il m’appela à son chevet. Il voulait me donner une lettre que je ne devrais ouvrir qu’après sa mort. Joseph a survécut. Sa tête ne fonctionnait plus très bien, mais ça ne changeait pas grande chose. A la campagne on est solidaire. Il a oublié la lettre… moi aussi. Je l’avais placée dans le grand buffet en noyer de la cuisine où elle est restée pendant trente ans.
Joseph mourut en 1945 quand son tracteur s’est renversé dans le champ pentu où il récoltait ses pommes de terre. Sa tête a cogné sur le vieux chêne. Il était tué sur le coup.

En 1950 j’ai décidé de vendre le buffet pour en acheter un plus moderne en Formica. C’est à ce moment que j’ai trouvé la lettre de Joseph. Je l’ai lue. Elle disait à peu près ceci :
« Monsieur le préfet.  Je dois vous faire un aveu. J’ai tué Mélie Barnier. Nous avons eu une dispute et  je l’ai étranglée.  Elle n’est pas partie en Italie.  Elle est enterrée au fond du terrain, vers le vieux chêne.  J’ai préféré ne rien dire car qui aurait repris la ferme si j’allais en prison. Désolé si je me suis mal comporté, votre serviteur, Joseph ».
Je me demandais bien ce que j’allais faire avec ce morceau de papier bien jauni. Ça m’a empêché de dormir pendant une semaine.  A la fin je l’ai déchiré et mis dans le feu. Le passé est le passé… pourquoi y revenir.


Le terre est un Être (Véronique Tcherepoff)

La terre est bien ronde , mais elle ne tourne pas rond
La terre à besoin d’eau, la terre est un cerveau
La terre tremble de peur, la terre a peur qu’ils meurent
Tous ces Êtres vivants, ses nombreux habitants

Les pires sont les «Hommes» avec toutes leurs envies
De pouvoir et d’argent, ils détruisent, ils abîment
Ne savent pas s’en tenir, comme les animaux
A prendre pour survivre, juste ce qu’il leur faut

Là je parle des Hommes qui sont civilisés
Pas ceux qui vivent encore dans des coins retranchés
Ceux là savent très bien vivre en harmonie
La terre les nourrit, elle les en remercie.

Ce n’est pas un secret, ici chacun le sait
Ils ont des bons côtés, les dit civilisés
La terre à besoin d’eux, faut qu’ils ouvrent les yeux
Faut pas la réchauffer, juste la câliner

Puis écouter vraiment, ses peurs, ses craquements
Elle hurle comme l’enfant face à l’indifférence
Ses larmes de tempête, ses ouragans d’angoisses
La terre est dans l’excès, mais a t-elle le choix

Ils devraient s’attendrir comme devant leur bébé
Vous savez ce petit Être, qu’ils sont fiers de montrer
Qu’ils protègent de tout, mais est-ce bien de tout…
Car après leur départ, sur cette terre il vivra !

J’ai un aveu à faire, parfois je suis comme eux
Oh ! À petite échelle, mais il n’y a pas de peu
La terre est un Être, dont je dois prendre soin
La terre c’est ma planète, je lui dois mon chemin.


Le paysan (Corinne P.)

De l’aube, au couchant
Pantalon râpé, sur son corps décharné
Manches retroussées, sur sa peau tannée
Il laboure la terre
Il laboure son champ
Raviné par le temps
Balayé par le vent
En silence, il sème
En silence, il aime
Il aime en secret
Sa vie solitaire de simple paysan
Quand il fermera les yeux
Trop fatigué pour se relever
A sa femme, à ses enfants
Il fera cet aveu
Impatient de retrouver
L’intimité de sa terre bien-aimée
Et s’y étendre pour l’éternité.


Lucien le taiseux (Hélène L.)

Un taiseux comme on dit dans la région : Lucien se suffit à lui-même et vit l’existence simple et âpre des gens de la montagne. C’est la terre qui l’a vu naître qui l’a rendu comme ça : ici pas le temps de batifoler ni d’avoir le cœur léger. Le labeur est là, qui vous attend et vous harcèle du lever au coucher du soleil. Alors des amis il n’en a  guère, en dehors d’Alfred avec lequel il s’offre un canon de temps en temps au bar du village. C’est quelqu’un de simple lui aussi et ils se contentent de rester là tous les deux, à siroter et ça leur suffit.
Peut-être du temps d’Emilie, Lucien était-il un peu plus rond et ouvert de tempérament. Il avait bien fait des efforts mais entre eux non plus il n’y avait jamais eu grandes effusions ni paroles fleuries. Enfin si bien sûr, lorsqu’il s’était agi de lui faire sa cour afin de la demander en mariage. Il faut dire que c’était une bien belle femme l’Emilie. S’il avait su …
Lucien finit de rassembler les bêtes en sécurité avant la nuit, la première qu’il va passer cet été à l’estive. Son chien a cet aboiement particulier qui se réjouit à la perspective du repos bien mérité. Au final il est presque heureux tel qu’il est là, poursuivant d’années en années ce savoir-faire ancestral. Sauf que la pensée d’Emilie le hante.
« Tiens, cette brebis devrait mettre bas d’ici quelques jours. Et cette autre, il faudrait lui panser la patte.»
Il se dirige vers le refuge et en revient avec le matériel nécessaire. Tout de même, la nature qui leur refusait cet enfant si ardemment désiré, ça n’avait rien arrangé.
« Voilà qui devrait te soigner ma belle ! Bonsoir mes trésors, ce n’est pas de sitôt que le grand méchant loup viendra vous prendre, j’y veille ! »
Il contemple comme en une prière adressée à Dieu, sa belle montagne. Mais oui, elle est bien un peu à lui, depuis le temps qu’il y emmène son troupeau. Par contre Dieu … des idées de châtiment l’obsèdent …
« Je suis un pas grand-chose, un pauvre bougre des montagnes. Alors forcément, je n’ai pas su la garder. J’aurais dû faire attention.»
Il s’installe sur son promontoire, écarte le torchon qu’il a posé sur le rocher et se taille une belle tranche dans la miche. Il entame le saucisson et se prend à regretter l’odeur de quand elle était encore là pour lui faire à manger.
Puis, le ventre contenté, il s’en retourne au refuge. Devant la flambée, car les soirées sont tout de même fraîches aux alpages, il sort son sac de pipes de bruyère et les petites gouges qui vont lui permettre de faire jaillir du bois brute leur jolie forme élancée. Il faut qu’il s’occupe les mains sinon il va devenir fou, avec ce secret de plus en plus lourd à porter.
Pourquoi aussi avait-il fallu qu’il l’apprenne par Alfred ? Blessé dans son amour-propre d’homme, il avait été poussé à commettre l’irréparable. Elle avait osé, dans leur propre lit conjugal … Encore et encore, ses tempes battent. A l’infini se reforme la  vision de son visage, parfait ovale abandonné sur le torse de ce traitre. Et aussi, le mince filet de sang à la commissure de leurs lèvres après qu’il leur avait asséné le coup fatal. Allait-il continuer à vivre un tel enfer ou passer aux aveux ?


Suspicion  (Colette Kirk)

Depuis quelques temps Nicole a constaté que Paul, son mari, a changé d’attitude et de comportement à son égard. Il est bizarre, rentre tard, plongé dans ses pensées dîne sans un mot, puis s’isole avec son ordinateur portable dans un coin du canapé. Nicole n’en peut plus de ce silence. Lorsqu’elle tente de  s’asseoir près de lui, à son approche il ferme précipitamment son ordi cachant ainsi l’écran. Mais quel secret peut-il bien cacher ?
Cet après-midi :
– Allô ! Chantal es-tu libre, j’ai envie d’aller au cinéma, veux tu venir avec moi ?
– Ok ! Je passe te prendre dans un quart d’heure !
Le choix du film n’est pas particulièrement heureux. Le scénario : un couple ne s’entend plus, se déchire, divorce, la garde des enfants etc, etc…
En sortant de la salle :
– Et bien , tu en fais une tête ma pauvre Nicole, t’as pleuré ? Je ne te savais pas si sensible. Pour te remettre on va aller se boire une bonne tasse de thé avec quelques mignardises.
Dans le salon de thé :
– Maintenant, Nicole tu vas me dire ce qui ne va pas. Je vois bien que quelque chose te tourmentes, parles ?
– Oh ! Chantal si tu savais ! Je suis la femme la plus malheureuse sur cette terre, je soupçonne Paul de me tromper !
– Paul te tromper ? Mais ce n’est pas possible ! C’est l’homme le plus droit, le plus franc, le plus honnête que je connaisse et il t’adore.
– Mais je t’assure…
Et Nicole lui relate dans quel atmosphère est la vie en ce moment. Plus de bisous, plus de câlins, une totale indifférence.
– As-tu pensé que Paul pouvait avoir des problèmes dans son travail. Risque-t-il un licenciement et prend les devants pour trouver une autre emploi ? – A-t-il une maladie grave et ne veut pas t’inquiéter ? Le mieux c’est que vous ayez une discussion, il finira bien par te dire « le pourquoi du comment de la chose » !
De retour à don domicile, Nicole a besoin d’un remontant. Sur la table basse du salon trône une bouteille de Porto. Un verre, puis deux et pourquoi un petit troisième ! Maintenant Nicole se sent prête à passer à l’attaque et telle une tigresse à l’affût, elle guette sa proie.
Deux heures plus tard  Paul arrive :
– Nicole ! Mais qu’est-ce que tu fais là ? Es-tu malade ? Je pensais te trouver dans la cui…
– Voilà ! Ça c’est bien « les mecs ». Ils arrivent en retard, aucune explication ou excuse, ils  se mettent les pieds sous la table en attendant d’être servis et après sans dire un mot ils vont faire « joujou » sur leur écran pendant que « bobonne » fait la vaisselle.
– Mais Bibiche je t’assure que…
Les trois petits verres de Porto commencent sérieusement à faire effet :
– Et tu crois que je vais me contenter d’explications vaseuses, de mensonges, mais maintenant tu vas me dire la vérité, toute la vérité !
– Mais que veux-tu que je te dise ?
– Toutes ces cachotteries, ces retards, ton mutisme ! Avoues, tu ne m’aimes plus, que tu as une maîtresse ?
– Ah ! Ce n’est que cela et bien oui, j’ai une maîtresse , mais ce n’est pas ce que tu crois !
Nicole s’effondre en pleurs, le ciel vient de lui tomber sur la tête. Elle se révolte, elle se déchaîne, tout son répertoire d’injures et d’insultes y passe.
Mais enfin vas-tu t’arrêter, je vais tout t’expliquer !
Le ton de Paul est tellement impératif que Nicole cesse de hurler :
– Voilà ! Tu sais que je suis nul en orthographe, aussi j’ai décidé il y a quelques semaines de me reprendre. Tu te souviens de mademoiselle Ghéaut, la maîtresse que nous avions en CM2, maintenant elle est à la retraite et elle m’a proposé de me donner des cours pour réviser les conjugaisons. Retourner à l’école à 45 ans ce n’est pas facile. Pour l’anniversaire de nos 20 ans de mariage, je voulais te faire une surprise… Et l’aveu que j’ai à te faire ? C’était de t’écrire une lettre d’Amour sans aucune faute d’orthographe.


Tout ce qui brille… (Aline Veylis)

Assis à sa table tout près du tableau, Quentin s’échappe de la classe en pensée. Il repense à sa précieuse découverte. Il se revoit ce matin de bonne heure, alors qu’il marche tranquillement sur le chemin de l’école et qu’un éclat très vif attire soudain son attention. Là dans la terre du caniveau, il y a une petite bague. Sans hésiter, Quentin se baisse pour la ramasser. Elle est sublime de finesse et de simplicité. Il décide de la garder bien à l’abri au fond de sa poche en attendant de lui trouver une cachette digne d’elle.
Quentin presse le pas pour arriver dans les premiers à l’école, afin de pouvoir mettre son trésor en lieu sûr. Vite il se faufile dans le couloir, passe devant la salle des professeurs et se dirige vers son casier. Il n’y a personne pour l’instant, tant mieux. Rapidement il ouvre la  porte du casier et sort délicatement de sa poche le bijou qu’il vient de trouver. Il n’en revient toujours pas d’avoir un tel trésor entre ses mains. Avec délicatesse, il place la bague dans sa cachette, juste sous le mécanisme de la serrure et referme son casier. La récré est terminée et il faut vite regagner la classe pour ne pas dévoiler son secret et surtout ne pas éveiller les soupçons de la bande du grand Jeremy.
Installé en classe Quentin tente donc d’écouter le professeur , mais sans succès car la bague monopolise son esprit. A qui offrir ce superbe bijou ? Une telle bague coûte forcément beaucoup d’argent. Comment expliquer que c’est avec son argent de poche qu’il l’a l’achetée ? Il n’y a que Coralie qui peut recevoir ce genre de présent. A elle il peut avouer la vérité ! Et puis il pourra lui dire que c’est pour la remercier de l’aider à faire ses devoirs de math. Décidément la situation est compliquée. Finalement, le trésor trouvé ce matin s’apparente plutôt à un cadeau empoisonné !!!
Il est tellement absorbé dans ses réflexions qu’ il ne voit pas que le professeur s’approcher de lui …

Et  ce qui devait arriver, arriva, Monsieur  Martin, professeur de math de son état, met fin aux cogitations du jeune garçon avec un tonitruant « Quentin au tableau !!!  »
C’est l’atterrissage forcé et surtout la panique générale pour Quentin, car il réalise qu’il a oublié de faire son exercice de math pour aujourd’hui. Il va falloir passer aux aveux.




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