La boîte à mots, le jeu : mai 2017

juin 2017 -
Si les mots avaient des ailes

Les mots proposés pour notre jeu de mai 2017: ESPACE – CHARMER – DÉCEPTION
Voici les textes que nous avons reçus


 

Les poules bio de Joséphine (Martine)

J’ai dis non ! Joséphine boude et la déception se lit sur son visage. Tant pis pour les bio-déchets, je ne veux pas de poules à la maison ! Elle a pourtant tout tenté pour me charmer en me disant que je ferai une bonne action pour la planète mais aussi pour elle. Elle consommerait de bons œufs frais avec des mouillettes chaque matin ! Mais que nenni ! Je n’en veux pas de ces gallinacés ! Mon jardin n’est pas la mer d’Iroise. Il manque d’espace, pas assez de bonne herbe à se mettre sous le bec pour que ces élégantes d’Houdan se pavanent en talons aiguilles dans les herbes folles.
– Je te promets de m’en occuper. Elles pourraient rester une heure ou deux en liberté surveillée dans le jardin. Ensuite elles rentreraient dans la cage en bambou que j’ai dénichée au fond du garage. Tu vois ! J’ai tout organisé.
Elle me culpabilise ma Joséphine ! Au fond elle n’a pas tort. Et si je faisais un geste pour la planète ? Mais surtout si je décidais de lui faire plaisir…
– Bon ! Tu as gagné. Tu es prête, on va les chercher tes poulettes.
Soudain son visage s’illumine, un cri de joie s’échappe de sa bouche. Puis elle se met à tournoyer tout en chantant « une poule sur un mur, qui picore du pain dur, picoti, picota, lève la queue et puis s’en va».


 

Clin d’œil à Robert D. ( Corinne P .)

Je ne dis pas merci à la fille du facteur, qui a su charmer en l’espace d’un instant, le père de ton cousin devenu pâtissier par déception amoureuse et qui depuis confectionne des gâteaux fabuleux qui vous tombent sur les hanches rien qu’à les regarder !


 

Mots d’amour (Caroline)

déception…
quel vilain mot !
il est tout gris, tout triste.
il pleure en se ratatinant dans le fond des cœurs et des estomacs.
il a un goût de malheur, de rancœur, d’amertume… aucun charme !
parlez moi de fleurs, de bonheur, de fruits d’été, d’espoir.
parlez moi de sourires, de soupirs amoureux…
parlez moi du soleil, de la gaité d’un regard que vous avez croisé, de souvenirs délicieux qui vous émeuvent et vous font trouver belle la vie !
baiser… voila un joli mot qui, peu importe le sens qu’on lui donne, est toujours source de plaisir.
parlez moi des mots doux, des mots tendres qui font que l’espace s’élargie et prend les couleurs de l’arc en ciel.

youpi ! … quel joli mot !


 

Réalité ou illusion (Colette Kirk)

Mlle Moreau, coule maintenant des jours tranquilles à la maison de retraite « la Châtaigneraie ». Françoise, son infirmière, aime que Melle Moreau lui raconte ses aventures passées.

– Pas encore couchée mademoiselle ?
– Comme vous le voyez, Françoise, je savoure encore un peu la douceur de cette soirée !
– Et de vous souvenir encore d’une autre soirée, là-bas, sous d’autres cieux.
– Oui, je ne peux pas m’en empêcher, surtout ce soir comme il y a bien longtemps !
– Vous me racontez ?

J’étais, alors, jeune reporter photographe et je me trouvais en compagnie d’un guide dans la brousse. Malik, dormait déjà sous la tente et moi j’admirais un merveilleux coucher de soleil. Après une journée torride, la soirée était douce. La lune montais lumineuse dans le ciel où scintillaient déjà des millions d’étoiles. Une étrange lueur attira mon regard. Quelque chose se déplaçait dans cet espace infini, auréolée d’une lumières de toutes les couleurs comme celles d’un arc-en-ciel. Je pensais à un avion, mais le vol était en zigzag ». Avait-il des difficultés ? Je pris mon appareil à photos et fis quelques clichés. A n’en pas douter c’était un objet volant qui se rapprochait rapidement de la terre. Maintenant je distinguais mieux sa forme. Ronde d’une petite envergue qui s’immobilisa presque au de dessus du camp. Puis doucement atterri. Je compris alors qu’il s’agissait une soucoupe volante d’où allaient sortir des petites hommes verts avec un œil au centre du front et des tentacules à la place des bras. J’étais paralysée de peur, mais pourtant je continuais à photographier. Un panneau latéral glissa et émergea de l’ouverture un être avec deux bras et deux jambes comme les terriens. Il était revêtu d’une combinaison-scaphandre et d’un casque à visière. La lumière de mon flash le fit se tourner dans ma direction, il s’approcha. En retirant son casque, il découvrit son visage et j’en restais médusée. Qu’il était beau ! Beau comme un Dieu. Beau à charmer plus d’un cœur ! Et surtout le mien. D’une voix étrange il se présenta :
Je m’appelle, Damillon. Je viens de la planète Xéronk 3 qui se trouve dans une galaxie à des milliers d’années-lumière de la vôtre. Depuis des siècles nous surveillons votre évolution et surtout maintenant votre technologie car vous pouvez envoyer des engins interplanétaires. Depuis des millénaires notre planète vie en harmonie et une paix constante, alors que sur la votre, il y toujours des guerres. Aussi, nous voulons, nous protégés des risques d’envahissement de la part des terriens. Si cela devait arriver, bien que nous soyons pacifistes, nous avons un moyen de défense, nous détruirions toute la planète bleue.
Tournant les talons, il remonta dans son engin qui disparu à la vitesse d’un éclair.

– Et vous ne l’avez jamais revu ?
– Jamais !
– Mais les photos ?
– Une fois développées qu’elle ne fut pas ma déception, il n’y avait rien, pas l’ombre d’un Xéronkcien !
– Et qu’avez vous fait ?
– J’ai tenté de prévenir les médias, mais on m’a prise pour une folle, une illuminée et comme je n’avais aucune preuve…
– Pourtant par les soirées où la lune monte brillante dans le ciel, je scrute ce firmament au cas où il reviendrai. Mais je ne sais toujours pas si c’était un être ou un robot.


 

Rendez-vous manqué (Susan)

Nous avions rendez-vous à 19 heures, devant l’horloge de la gare de Lyon. Je suis arrivée à dix-neuf heures moins vingt. Je suis toujours en avance. C’est mon plus gros défaut. C’était le 5 décembre et j’étais emmitouflée dans une grosse parka, cache misère taille 48 de chez H et M.
Je cherchais un endroit au sec, car il pleuvait des cordes. Il n’y avait pas beaucoup d’espaces couverts et je me suis trouvée serrée contre un mur, entourée de gens qui comme moi attendaient. J’ai du rabattre ma capuche. Incognito. Cela me convenait tout à fait. J’attendais Marc, candidat «prince charmant», déniché sur un site de rencontre. Nous n’avions pas échangé de photos. Marc disait que c’était ringard et qu’il ne fallait pas juger une personne par son aspect. J’avais trouvé cela très galant. Mais à présent je commençais à imaginer qu’il voulait peut-être cacher quelque chose… un gros nez pointu, une calvitie galopante, une obésité monumentale, une lèpre fulgurante… De toute façon en matière de rencontre je courrais de déception en déception. Je ne cherchais pas la lune… juste un prince qui ne soit pas un crapaud déguisé. Quand on est en avance on trouve toujours le temps très long, surtout quand on considère que la plupart des gens sont toujours en retard. Seulement dix-neuf heures dix et j’étais déjà là à attendre depuis une éternité ! Alors, histoire de passer le temps, j’ai entamé une conversation avec mon voisin d’infortune, qui lui était là bien avant moi, trempé, sans casquette ni capuche. C’était un jeune homme souriant et sympathique. Lui aussi attendait quelqu’un. Il disait que lui aussi était toujours en avance. Dix-neuf heures vingt cinq. On a rigolé, un peu embarrassé quand-même de poireauter comme des âmes en peine. J’ai vérifié mon téléphone pour voir si par hasard Marc n’avait pas laissé un message. Rien ! Mon compagnon d’infortune regardait sa montre toutes les deux secondes. Il m’a dit qu’il attendait son frère qui a dû être retardé au travail. Du coup, pour ne pas avoir l’air bête, j’ai dit que j’attendais ma meilleure amie qui a certainement eu un empêchement et qui ne rechargeait jamais son portable. Au bout d’un moment j’en ai eu assez, et puis ce Marc avec une demi-heure de retard ne pouvait pas être l’homme de mes rêves.
« Bon, pour moi c’est fichu. Je rentre », dis-je, finalement rassurée de pouvoir retrouver tranquillement ma télé au lieu de passer une soirée à tenir le crachoir à un looser de plus.
« Oui, moi aussi. Je suis trempé… Eh, vous ne voulez pas qu’on aille prendre un pot à côté, histoire de fêter nos rendez-vous manqués ? »
« Ben, ok, pourquoi pas. Moi c’est Lucie, » dis-je, en lui tendant la main.
« Lucie ? Et bien ça alors. C’est toi Lucie ! ? Voilà, moi c’est Marc ! »


 

Au bord du gouffre (Gg)

– Nous approchons de la limite intersidérale.
La phrase, prononcée pourtant d’un voix calme par notre Capitaine, nous fige sévère. Seule Colette dans son décolleté abyssal et ses froufrous rose bonbon, continue ses gloussements de chèvre mutante, ponctuant chacune de ses interjections par des ‘Haoui Clac Clac’, forme évoluée des ‘Voilà’ de jadis. Il faut dire que, tous autant que nous sommes, nous avons subi de mutiles expositions aux rayons z, bien plus puissants que les x, qui ont provoqué, au fil des siècles, chez chacun d’entre nous, quelques évolutions surprenantes. C’est ainsi que… mais revenons au récit.
– Capitaine je ne me sens…
Trop tard. On ne saura jamais qui a parlé. Le Zyphare, dernier bijou de la technologie du quarante-et-unième siècle, a franchi la limite ultime de l’espace dans une grande débauche de sifflements divers. Nous voici plongés, hagards, dans un autre monde aux repères fluctuants.
– Capitaine je ne…
Mais le Capitaine n’entend pas, trop occupé qu’il est à maintenir le cap dans cet univers gluant aux couleurs orangées bordées de reflets bleutés. Des nuances qui pourraient charmer le passant si elles n’avaient quelque chose d’agressif. C’est vrai quoi, les tons pastel, cela donne une certaine saveur, une douceur de vivre diraient les anciens, alors que là, l’orange flashe et le bleu gaspille. Du travail bâclé. Une grosse déception pour Colette qui exprime sa réprobation par des ‘Pas beau Haoui Clac Clac…’ qui finissent par lasser le Capitaine lequel l’apostrophe jaunement (le vert n’existe pas dans cet univers).
– Lâche-moi veux-tu ou…
De fait, malgré le pilotage expérimenté du Capitaine, le Zyphare se dirige droit vers un gouffre gigantesque et ricanant, doté d’énormes plombages récents, donnant un air quelque peu insatisfait à leur possesseur. Heureusement, Colette reste muette et le Capitaine, dans un effort dantesque, réussit à démarrer la fusée sous-jacente, celle dont personne à part lui ne connaît la présence.
– Pas encore pour cette fois… murmure-t-il
Et il éclate d’un rire dévastateur qui nous scotche aux parois du vaisseau.
– Capitaine…
Mais l’animal n’en a cure et, rien que pour rigoler, retourne se frotter aux molaires du bord du gouffre.


 

Peter pan (Vincent Carrere)

Victor jouait en cercle, en association avec d’autres de même taille. De là, la vie parait plus gigantesque. Une grande route fait penser à l’infini, c’est un périple pour ouvrir un haut placard, et un ballon fait fondre en larme. C’est Lucie qui se l’était pris celui-la, en plein dans l’estomac. Elle se crispa, serra les dents, le désarroi semblait timidement se peindre sur ses lèvres. C’était une battante mais celle-là, elle ne l’avait pas vu venir. Le rond se resserra sur sa petite personne, l’empressement fit ameuter la troupe. Mais Victor restait à l’extérieur. Il sentait que son espace à lui était nulle part, ça tournait encore et encore dans sa tête mais aucune position stable, aucune attitude claire ne se formulait à lui. Pendant que la douleur de Lucie s’offrait aux regards curieux des autres. Pendant que ses larmes attirèrent l’inquiétude et l’amertume du groupe. Victor, qui lui avait flanqué le coup, restait paralysé par un excès d’agitation mentale. Pardon ! Il ne savait plus que dire ça. Pardon ! Pardon ! C’était nerveux, un peu comme une formule magique qui ne se réalisait pas. Pour lui comme pour elle, c’était une déception. La première à laquelle suivront les autres. C’était l’instant qui les séparerait toujours de plus en plus.

Victor était toujours petit, il voyait toujours les choses en grand. Ses amis (anciens) étaient devenus grands, mais ils voyaient tout petit. Quand il était dehors, il croisait des visages connus. Quand il parlait, on ne lui répondait qu’en passant. Quand les anciens discutaient entre eux, un opercule transparent recouvrait la compréhension de Victor. Devant lui se projetait des questions comme : est-ce que j’ai changé ? Ou c’est eux ? Est-ce qu’il y a eu une erreur ? Est-ce que je resterai toujours comme ça ? Bizarre pour un enfant émerveillé de l’instant, de produire un mouvement inverse, un mouvement contraire à sa nature en s’abandonnant à l’insondable. Ces questions obstruaient sa libre pensance. Il s’y butait comme une mouche contre un double vitrage. Pourtant, il avait pour habitude de voguer d’une chose à l’autre comme un spationaute s’avance, pose ses pieds sur une planète inconnue, comme un papillon se charme de se poser sur toutes les fleurs où il le désire ou comme un fleuve franchit chaque son parcours, sans trêve. Il s’enivrait de tout découvrir, avec passion. Mais un barrage engendré par la fascination pour l’inaccessible point à son âme. Maintenant il ne se rencontrait plus comme avant. Son amour ne s’étendait pas au-delà de sa conscience individuelle et celui-ci ne se frayait un chemin que difficilement jusqu’à son corps. Victor ne pouvait réaliser qu’en idée, tout ce que la condition humaine permet de faire. Il en vint ainsi jusqu’où il découvrit qu’une rencontre était possible…


 

Le prince des eaux dormantes (Aline Veylis)

Fin, élancé, le feuillage délicat, je suis ici au bord de l’eau depuis si longtemps que mes racines malicieuses tentent de multiples escapades pour investir les lieux et charmer les visiteurs. Avec leur allure de sentinelles, elles m’ont toujours volé la vedette, on ne voit qu’elles. Pas un promeneur qui ne se soit extasié devant elles. Est-ce leur couleur brun clair patinée de vert lichen qui tranche sur le vert tendre de la pelouse ? A moins que ce ne soit leur forme semblable à des doigts accusateurs pointés vers le ciel pour le prendre à témoin du sort qui m’est réservé ?
Oui c’est cela, il faut que les visiteurs comprennent bien qu’ici je ne suis pas heureux. J’étouffe, je manque de place et je n’aime pas avoir les pieds dans l’eau. J’ai des souvenirs heureux de ma jeunesse en liberté parmi mes frères et sœurs, mais nous avons tous été brutalement séparés. Je voudrais tant revoir la belle forêt où je suis né, respirer les parfums délicats émanant de compagnons en pleine floraison comme l’acacia, le tilleul …. Aussi en arrivant ici imaginez ma déception lorsque j’ai découvert l’emplacement qui m’était réservé !!!
Pourquoi les hommes s’obstinent-ils toujours à mettre des êtres vivants en cage.
J’aspire à plus de calme et de sérénité, d’espace, de bonheur en somme. Ici je peux à peine déployer mes branches sous peine de déranger mes voisins. Mon voisin le cèdre bleu pleureur lui a tout compris, il a décidé d’occuper son territoire en restant humblement près du sol, sans chercher à dominer ses voisins. C’est parfaitement réussi, tel qu’il est-il assure une protection totale aux visiteurs et ses basses branches peuvent recueillir les confidences ou les secrets. Je serai presque jaloux tiens. Heureusement mes racines sont là à s’épanouir au bord de l’eau comme les fleurs au printemps et à travers elles j’existe un peu. En un mot, elles sont un peu mon oxygène.


 

Ensorcelé (Marc-Aurèle Nuel)

Tu as laissé flotter, dans un nuage parfumé,
le souvenir de ton sourire,
le rire de ton regard.
… Tu me manques…

Comment supporter l’absence de celle
qui rend mon monde vivable
et accroche dans le coin de mon ciel
une tache de lumière en forme de soleil ?

La nuit entre comme un chat par la fenêtre,
doucement, sans éveiller l’attention,
et l’obscurité emplit lentement notre chambre
comme l’encre indigo dans un flacon scintillant.

Tu m’as souri et, en
l’espace de cet instant,
la déception de ton absence s’est envolée, noire désillusion…
Sous le charme, ensorcelé…


 

Saint-Tropez (Hélène L.)

Dans la moiteur estivale, les corps s’expriment sur un rythme électro swing caractéristique de cette génération. Et là elle se trouve, sur la piste, pur objet de désir. Evoluant dans sa robe flamboyante, tournoyant et ondulant telle une liane, elle appelle une sorte de fascination. Elle occupe tout l’espace du « dance floor » : ils se sont mis en cercle autour. Elle a quelque chose de félin cette inconnue, une sorte de souplesse animale qui captive le regard des hommes. Leurs compagnes aussitôt en alerte se montrent d’autant plus câlines et charmeuses pour repousser la menace pressentie. En amour rien n’est jamais acquis. Et eux pour donner le change lancent des plaisanteries inconvenantes sur la cambrure et la tenue de cette grande rousse magnétique aux yeux verts. Faisant semblant de ne pas avoir été accrochés, ils poursuivent leurs commentaires dans un registre un peu cru, preuve qu’elle les charme encore sur toute la ligne. Elle est tout à coup rejointe par une plantureuse brune aux courbes sensuelles. Et le duo lascif qu’elles entament ne laissant aucun doute sur la nature de leur relation, fait juste place à une immense déception chez tous les types de cette boîte de nuit qui avaient échafaudé un plan pour hameçonner la grande rousse.



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